Troubles psychotiques - Généralités
Dernière modification : 04.10.2021
Les troubles psychotiques sont caractérisés par la présence d'idées délirantes et d'hallucinations. On les retrouve dans de nombreux troubles psychiatriques. Le premier épisode psychotique est une urgence diagnostique et thérapeutique et il apparait dans la grande majorité des cas entre 13 et 30 ans.
Sémiologie
Les troubles psychotiques émergent dans la grande majorité des cas vers la fin de l'adolescence et au début de l'âge adulte sous la forme d'un épisode psychotique.
Les troubles psychotiques sont définis par des signes cardinaux spécifiques et considérés comme étant à la base de ces troubles que sont :
- les idées délirantes ,
- les hallucinations ,
- la désorganisation.
On observe souvent de façon associée des signes aspécifiques tels que :
- de l'anxiété,
- une humeur dépressive,
- un retrait social et un isolement,
- des troubles de la concentration,
- des troubles de l'appétit et du sommeil.
Les symptômes psychotiques peuvent se retrouver dans de nombreux troubles psychiatriques (ex : dépression avec caractéristiques psychotiques).
Diagnostic positif
Un trouble psychotique débutant doit être suspecté devant :
- la présence d' idées délirantes ,
- la présence d' hallucinations ,
Mais également devant des signes moins spécifiques qui peuvent être des prodromes :
- un retrait social ou une détérioration du fonctionnement,
- des symptômes de registre dépressif : humeur dépressive, irritabilité, troubles de la concentration, troubles de la motivation, troubles du sommeil,
- une anxiété,
- une méfiance, un comportement étrange, une diminution de l’hygiène personnelle, des affects inappropriés, un discours vague ou trop élaboré, des croyances bizarres ou des pensées magiques , des expériences perceptives inhabituelles.
Un trouble psychotique émerge le plus souvent de façon progressive et non pas brutale.
Formes cliniques
Les troubles psychotiques sont une famille de troubles parmi lesquels on trouve :
- la schizophrénie qui est le trouble psychotique le plus fréquent,
- le trouble psychotique bref ou aigu,
- le trouble délirant persistant,
- le trouble schizo-affectif.
Les symptômes psychotiques peuvent aussi se retrouver dans ne nombreux troubles psychiatriques :
- trouble dépressif avec caractéristiques psychotiques,
- trouble bipolaire avec caractéristiques psychotiques.
Les troubles psychotiques peuvent aussi être à l'origine de catatonie.
Comorbidités
Les comorbidités des troubles psychotiques sont principalement :
- addictives,
- cardiovasculaires et métaboliques,
- suicidaires,
- d'autres troubles psychiatriques (troubles anxieux, troubles de l' humeur ).
Évolution
Un épisode psychotique peut rester isolé et ne jamais récidiver.
Un épisode psychotique peut évoluer vers un trouble psychiatrique sévère (trouble bipolaire, schizophrénie, trouble dépressif avec caractéristiques psychotiques). Il n'est pas spécifique à la schizophrénie.
Les taux de rechute sont estimés à 60 %, voire plus, sur les deux ans qui suivent l'arrêt du traitement.
Parmi les patients qui ont fait un premier épisode de psychose, 80 % sont à risque de faire un deuxième épisode dans les trois à cinq ans qui suivent, la guérison des épisodes suivants étant plus lente et souvent plus partielle.
À la suite d'un deuxième épisode psychotique, il devient très improbable que les patients ne fassent pas de rechute s'ils ne prennent plus d'antipsychotiques.
Évaluation
La plupart des troubles psychotiques émergent chez l'adolescent et le jeune adulte. Ces troubles souffrent d'un retard à la prise en charge avec des conséquences péjoratives en termes pronostiques.
Leur dépistage est indispensable afin de permettre une prise en charge la plus précoce possible.
Les questions pour un dépistage rapide des symptômes psychotiques pourraient être :
- Avez-vous dernièrement éprouvé un sentiment étrange ou bizarre que vous ne pouvez pas expliquer ?
- N'avez-vous jamais entendu des choses que les autres ne peuvent entendre, comme des bruits ou les voix d'autres personnes chuchotant ou discutant ?
- N'avez-vous jamais eu des visions ou vu des choses que les autres ne peuvent voir ?
- Ressentez-vous parfois que les autres vous importunent ou cherchent à vous faire du mal ?
- N'avez-vous jamais eu l'impression que les gens parlaient de vous ou qu'ils vous prêtaient attention de manière particulière ?
- Avez-vous peur de quelque chose ou de quelqu'un?
Questionner si possible également l'entourage du jeune.
Il existe un auto-questionnaire de dépistage de la présence de prodromes psychotiques.
La suspicion d'un trouble psychotique doit s'accompagner d'un bilan clinique et paraclinique à visée étiologique et pré-thérapeutique :
- une évaluation à la recherche de comorbidités psychiatriques et non psychiatriques
- une examen neurologique
- un ECG
- un bilan sanguin
- une IRM cérébrale
Il doit s'accompagner d'une évaluation du potentiel suicidaire.
Conduite à tenir
L'émergence d'un premier épisode psychotique chez un adolescent ou un jeune adulte est une urgence médicale et doit faire adresser à un psychiatre.
- L'évaluation médicale doit se faire dans les 48h et psychiatrique dans les 7 jours.
Quand orienter le patient vers un psychiatre ?
- s'il s'agit d'un adolescent, d'un jeune adulte ou d'une femme dans le péri-partum
- si besoin d'une aide au diagnostic et au traitement,
- en cas de dégradation sévère du fonctionnement,
- en cas de comorbidités non psychiatriques ou addictologiques,
- en cas de non réponse au traitement initial.
Quand adresser aux urgences ?
- en cas de potentiel suicidaire avéré ou suspecté,
- en cas de risque hétéro-agressif.
La prise en charge consiste en :
- l'instauration du traitement antipsychotique et suivi de la réponse thérapeutique et de l'évolution des symptômes,
- le suivi des effets indésirables des traitements antipsychotiques,
- le suivi des facteurs de risque métabolique et cardiovasculaire,
- la prise en charge des comorbidités psychiatriques et non psychiatriques,
- une prise en charge psychosociale,
- des bases de psychoéducation avec une information sur la maladie, les traitements et les ressources, notamment familiales quand c'est possible.
Traitement de la phase aigue :
- Anxiolyse du patient par benzodiazépines dès la suspicion diagnostique.
- Les antipsychotiques de deuxième génération (ADG) constituent le premier choix thérapeutique, notamment chez les patients non traités auparavant et particulièrement sensibles aux effets secondaires extrapyramidaux et sédatifs des antipsychotiques.
- Les ADG recommandés en première ligne d'un premier épisode psychotique sont la rispéridone, la quétiapine et l'aripiprazole.
- Les traitements antipsychotiques retard d'action prolongée peuvent être proposés.
⚠️ le traitement antipsychotique doit être instauré progressivement et à faible dose : principe du "start low-go slow".
- Le traitement des troubles de l' humeur associés éventuels (traitement de la dépression ou de la manie, p. ex. : Lithium).
- L'objectif du traitement est la rémission totale des symptômes et le retour au fonctionnement de base.
Les objectifs du traitement d'entretien sont :
- l'amélioration et la restauration du fonctionnement antérieur,
- la prévention des rechutes et des récidives.
Garder un discours et une attitude positive et recevoir la famille pour les informer
Arrêt du traitement :
- Après un premier épisode psychotique, le traitement médicamenteux doit être poursuivi durant 2 ans,
- il peut ensuite être arrêté de façon progressive, sur une durée de plusieurs mois.
En cas de non-réponse ou de réponse partielle au traitement médicamenteux :
- revoir le diagnostic,
- rechercher une mauvaise observance du traitement (souvent due à une mauvaise compréhension de la maladie),
- rechercher un trouble d'usage de substance.
Pour ces non-répondeurs au premier traitement, les stratégies pharmacologiques possibles incluent :
- optimiser la dose d'antipsychotiques,
- changer d'antipsychotique,
- changer pour un antipsychotique intramusculaire retard de longue durée d'action.
Si le patient est orienté vers un spécialiste, celui-ci peut suivre d'autres stratégies :
- prescrire l'olanzapine ou la clozapine chez les patients résistants au traitement,
- élargir le traitement par clozapine (par ex., ajouter de la lamotrigine ou de l'acide valproïque).
Le case-management
Les recommandations australiennes préconisent la coordination des soins dans le cas d'une psychose émergente par un case-manager. Certains services en France proposent ce type d'accompagnement spécifique.
Références
Traduction du texte tiré et adapté de : George Foussias and Z. Jeff Daskalakis, The patient who is psychotic Psychiatry in Primary Care (CAMH, 2011).
The Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders (5th ed.; DSM–5; American Psychiatric Association [APA], 2013)
Recommandations Australiennes de 2016 : Australian Clinical Guidelines for Early Psychosis, Second edition updated June 2016.
Ressources
Principes de prise en charge des premiers épisodes psychotiques
Brochure du Professeur Marie-Odile Krebs et du Docteur Florian Lejuste à destination des personnels soignants amenés à rencontrer des jeunes, généralement âgés de 15 à 30 ans, présentant un premier épisode psychotique.
Guide du PEP à destination des patients et de leur entourage
Le premier épisode psychotique expliqué aux patients et à leur entourage par le Service des publications du Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) au Canada.
La carte des case-managers PEP48
Carte des case-managers PEP48 en Hauts-de-France.
Qu'est-ce qu'un case-manager ?
Infographie du projet PEP48 par la F2RSMpsy pour présenter la fonction de case-manager.
Prodromal Questionnaire (PQ16)
L’autoquestionnaire PQ-16 (Ising et al., 2012) sert au repérage de symptômes psychotiques en population générale. Il peut être proposé à tout patient de moins de 30 ans pour lequel on souhaite repérer des prodromes ou un trouble psychotique.